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Vincent Calabrese parvient à tuer le spiral

Le génial horloger est l’inventeur d’un nouvel organe oscillant qui remplace le ressort-spiral par deux lames élastiques. Baptisé Calasys, le mécanisme est adaptable à tous les mouvements et fonctionne avec un échappement traditionnel.

«Cela fait depuis 1988 que je dis que le couple balancier-spiral doit divorcer!» Vincent Calabrese a le sens de la formule. Autodidacte surdoué, co-fondateur de l’Académie horlogère des créateurs indépendants (AHCI), l’horloger est connu autant pour son caractère bien trempé que pour ses créations extraordinaires. C’est à lui que l’on doit, notamment, le mouvement baguette de Corum et le tourbillon volant de Blancpain. A 78 ans, loin d’avoir rangé ses micros, il vient de réaliser l’un de ses vieux projets: supprimer le spiral sur une montre mécanique. Son invention, baptisée Calasys, met en scène deux ressorts-lames symétriques agissant comme organe de rappel. Une solution simple, qui s’implémente sur n’importe quel mouvement et fonctionne avec le traditionnel échappement à ancre suisse.

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Lorsque l’échappement donne son impulsion à l’ancre, le balancier pivote, entrainant avec lui le pignon, lequel engrène avec le râteau. Celui-ci va alors appuyer sur le ressort-lame, qui va le ramener à son point d’équilibre.

Esclave du spiral

Depuis toujours, la motivation première de Vincent Calabrese est d’inventer. Et de simplifier. «La pire chose dans la recherche, c’est le savoir, lance-t-il. En tant qu’autodidacte, je suis un homme libre!» C’est donc sans a priori – mais tout de même avec une longue expérience – qu’il s’attaque en 2019 à l’organe dont il espère la mort depuis longtemps: le spiral.

Depuis 350 ans et son invention par Christian Huygens en 1675, le spiral est en effet la seule solution utilisée dans les montres mécaniques pour séquencer l’énergie du barillet. Or, ce petit ressort a procuré – et procure encore – des cheveux gris à des générations d’horlogers et de régleuses: des problèmes de synchronisme, d’amplitude et de gravité dus essentiellement à l’asymétrie, à la masse et au poids du ressort, nécessitent un fastidieux et fragile processus de réglage. «On est esclave du spiral!», s’anime Vincent Calabrese.

Frottements minimes

Dans un effort de déconstruction-reconstruction, l’horloger s’est donc évertué à réinventer le couple balancier-ressort. Et le résultat est bluffant: sur l’axe du balancier, il a remplacé le spiral par un pignon; celui-ci est connecté à un râteau, dont le rapport d’engrenage est calculé de manière à ce que le balancier puisse avoir la plus grande amplitude possible, tout en maintenant l’angle de rotation du râteau le plus petit possible; enfin, pièce maîtresse, l’organe de rappel se transforme ici en deux ressorts-lames symétriques, reliés à leur base et encadrant le bras du râteau de part et d’autre.

Amagnétiques, râteau et ressort sont réalisés avec le procédé LIGA, une technologie additive qui combine photolithographie et croissance de matière dans un bain galvanique. A leur extrémité, les sautoirs ont ainsi été équipés d’une sphère de friction, minimisant au maximum les frottements. Enfin, grâce au rapport d’engrenage pignon-râteau, les sautoirs ne subissent qu’une flexion de 45 degrés, quand bien même le balancier décrit une amplitude de 360 degrés.

Cette construction, appelée Calasys par son créateur et brevetée au niveau mondial, a été prototypée et implémentée avec succès sur un calibre 2892. «C’est extrêmement simple et solide, souligne Vincent Calabrese: plus besoin d’un piton, plus besoin d’une raquette, plus besoin de toutes les autres manipulations délicates qui risquaient de causer des dommages irréparables. De plus, ce mécanisme s’adapte à tous les mouvements et tous les échappements!»

Si le prototype fonctionne, l’horloger ne souhaite pas passer à la phase d’industrialisation tout seul. Pour cette étape supplémentaire qui lui permettra de fiabiliser et de mesurer le rendement du Calasys, il compte sur un partenaire encore à trouver. «Je ne veux pas gérer tout cela, je suis trop vieux! Mais je ne veux pas non plus vendre simplement mon invention: d’abord parce que j’y songe depuis longtemps et qu’elle me tient à cœur; mais aussi parce j’aimerais que la marque Vincent Calabrese me survive, non pas par vanité, mais pour donner espoir à des gens qui pensent ne plus en avoir. Parce que je dois mon entrée dans l’horlogerie au pur hasard!»

Avis aux amateurs!

Fabrice Eschmann

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