GemGenève a fermé ses portes et sa septième session au début du mois de novembre dans l’effervescence des ventes aux enchères des grandes maisons genevoises (voir Gold’Or 08/23). Ce salon, à la fois intimiste et riche, a compté cent quarante-huit exposants professionnels dont trente-trois revenaient pour la septième fois à Genève et plus de quatorze découvraient le salon pour la première fois. Issus de dix-huit pays, ils ont mis en avant des pièces d’une qualité exceptionnelle.
Depuis sa création en 2018, c’est la deuxième fois, seulement, que GemGenève ouvre deux expositions: une en mai et l’autre en novembre. Est-ce trop? Les avis diffèrent. Mathieu Dekeukelaire, directeur du salon, à qui nous avons franchement posé la question, répond: «L’avenir nous le dira et, surtout, la réaction des exposants lorsqu’ils feront le bilan de leur année de «foires» à travers le monde. Comme vous le savez, notre Salon a été créé par des exposants pour des exposants et cela reste vrai à l’aube de la huitième édition. Nous savons qu’il y a toujours un peu moins d’exposants sur la fin d’année mais la différence n’est pas si importante. Alors nous verrons bien …».
Un «hub» unique
GemGenève offre une plateforme d’expression réunissant passion, expertise et éducation; un hub unique de rencontres entre les créateurs de bijoux, les marchands de pierres précieuses, les collectionneurs, les connaisseurs, les laboratoires, les acheteurs professionnels et privés, la presse spécialisée, tous réunis sous un même toit. Exposition exclusive, conférences et tables rondes rencontrent chaque fois plus de succès. «The Pearl Odyssey» a émerveillé les nombreux visiteurs de cette exposition exceptionnelle, voulue par Ronny Totah. Une fabuleuse occasion de «réviser» ses connaissances sur les perles fines, les plus anciens joyaux du monde. Cette exhibition a bénéficié du soutien de la maison Chaumet, du collectif Flee Project, de la collection Al Fardan, d’un collectionneur privé et de plusieurs exposants partenaires. Les bijoux en perles ont traversé toutes les époques avec des périodes de haut et de bas. Après l’épisode difficile du Covid, durant lequel le monde s’est arrêté et de nombreux acteurs ont été malades ou pire encore, le marché des perles fines, mais aussi celui des perles de culture, bien plus étendu, est résilient. Les prix, par contre, ont pris l’ascenseur d’une façon incroyable, entraînés par les acheteurs chinois qui acquièrent tout ce qui passe à leur portée.
Talents Emergents et Nouveaux Designers
Cette édition a accueilli neuf nouveaux designers talentueux et leur a donné une grande visibilité. Dans les Talents Emergents, une française Capucine H. met la beauté du monde au service des sentiments. Passionnée de nature et de voyages, elle puise son inspiration, dessine, façonne et crée avec éthique. «Wahlenbergbreen» est le nom d’un glacier de l’archipel du Svalbard, en Arctique, dont la créatrice s’est inspirée pour illustrer ici une fissure, là l’érosion ou encore la texture de l’eau. Avec sa collection Thétys, Capucine, au fil de recherches et d’échanges avec des biologistes marins, influencée par des photographies de scientifiques, offre un panel de bijoux aux formes nouvelles, complexes, empreintes de différents matériaux et textures. Une belle découverte!
L’arménien Shavarsh Hakobian
Il est toujours étonnant de se rendre compte que des artistes très éloignés géographiquement mais souvent également de notre mode de vie, ont un type de création qui fait immédiatement «tilt». Shavarsh Hakobian est basé à Erevan, la capitale de l’Arménie. Il aime expérimenter des matériaux non conventionnels tels le bois, le cuir, les tissus, les défenses, les ailes de papillon en les combinant avec des matériaux précieux et des gemmes ou des perles. Il a créé sa marque éponyme en 2008 et privilégie la sculpture sur cire qui lui donne une grande liberté de création. Ses formes sont audacieuses et agrémentées de nombreux détails. Certaines de ses bagues ressemblent à des bouliers chinois, d’autres montrent des formes triangulaires sublimes et subtiles.
Diva, l’Inde fabuleuse
Rishi Mukesh Metha et sa marque Diva Jewels sont la vraie révélation de ce salon. Son innovation et sa créativité brisent les frontières traditionnelles de la fabrication de bijoux et redéfinissent l’art de l’ornementation. Ses réalisations sont gaies, colorées, lumineuses, magnifiquement empierrées et font montre d’un réel engagement envers la qualité et le savoir-faire. Le supplément d’âme de ses créations vient de la mobilité du bijou, de sa façon de se séparer en plusieurs autres. Elégance et sophistication pour sa bague représentant un colibri, dont toutes les plumes sont mobiles ou en « trembler » et qui vient butiner une fleur. Le bijou se divise et donne vie à des éléments en mouvement. La collection «Dance of Brilliance», qui scintille à chaque impulsion, est à couper le souffle. Tout est créé en Inde et à l’interne! A suivre avec beaucoup d’attention.
Strong & Precious Art Foundation
Pour la seconde fois au salon, la fondation Strong & Precious expose des bijoux de designers ukrainiens. C’est une magnifique broche « libellule » blonde, qui, au milieu d’une forêt d’épis de blés, a attiré notre attention. Les vastes ailes de l’insecte sont composées de deux splendides morceaux d’ambre et agrémentées de quelques petits diamants sur une monture en or jaune. Pièce exceptionnelle. L’ambre de la Baltique est bien connu mais celui d’Ukraine ? Moins célèbre, il est malheureusement très prisé et est devenu la cause d’une déforestation désastreuse pour le pays. Iryna Karpova, artiste, designer et architecte, a fondé la marque Organic Jewellery pour faire mieux connaître cette résine végétale datant de dizaines de millions d’années.
Cette septième édition a tout à fait rempli son rôle et a fait découvrir au public des nouveautés plus qu’attrayantes, des conférences passionnantes et des pierres et perles exceptionnelles. Que voulez-vous de plus? Rendez-vous du 9 au 12 mai 2024!
Catherine De Vincenti